Les addictions au travail : comment faire face en entreprise ?

On ne s’attend pas toujours en tant que chef d’entreprise ou manager à faire face aux conduites addictives au bureau. Pourtant, ce sujet ne devrait pas être tabou, car c’est un fait : les addictions au travail existent bel et bien. Bien entendu, il peut s’agir d’une personne fumeuse régulière, d’un usage modéré de l’alcool ou d’une vraie dépendance… Les profils sont nombreux. Mais la MILDECA (Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives) a estimé en 2021 que sur les 29 millions d’actifs en France, 20 millions étaient concernés par l’addiction sur le lieu de travail. IlyCoach vous indique comment faire face à cette problématique au sein de votre entreprise.

 

Les addictions au travail : de quoi s’agit-il ?

Avant de connaître les moyens de prévention en votre possession, il est important de maîtriser les bases de ce sujet. Les addictions au travail revêtent de plusieurs formes, mais on les retrouve plus particulièrement dans certaines tranches d’âge d’actifs (18-25 ans et + de 50 ans). Les hommes sont également deux fois plus concernés que les femmes. Le travail de nuit, les postes exigeant de la vigilance ou des responsabilités très élevées, mais aussi les postes de pilotage ou de conduite sont les plus impliqués dans les conduites addictives au travail.

 

Une définition de l’acquisition

L’addiction se définit comme une dépendance à une substance ou une activité, avec des répercussions négatives pour la vie de l’usager. On peut être addict à des produits (drogue, alcool, médicaments, tabac…) ou à des pratiques (jeux d’argent, téléphone, etc.).

Il y a plusieurs niveaux d’addiction : 

  • un usage simple, qu’il soit occasionnel ou régulier, mais qui n’entraîne pas en soi de vrais dommages sur l’organisme,
  • l’abus qui est une consommation répétée aux conséquences délétères,
  • la dépendance : il y a une vraie perte de contrôle et un désintéressement de tout le reste.

Quand les addictions arrivent au travail, cela peut provenir de plusieurs facteurs. L’importation de la dépendance est la cause la plus répandue : le collaborateur a une dépendance qui vient de sa vie privée. Mais on trouve également le cas de l’acquisition où cette addiction se met en place sur le lieu de travail : présence d’alcool pendant les pauses en équipe par exemple. Enfin – et c’est ce qui explique que les secteurs les plus touchés sont ceux qui demandent le plus de vigilance -, l’addiction peut également provenir d’une volonté d’adaptation, comme avec des médicaments pour lutter contre le stress ou des dopants pour rester alerte.

 

Les risques des addictions au travail

Chaque addiction comporte son lot de problématiques de santé pour la personne touchée. Au niveau de l’organisme, il s’agit d’une vraie pathologie cérébrale. Dans le cas de consommation de substances comme l’alcool, le tabac ou une drogue psychoactive, les conséquences sur le corps peuvent être très graves. En France, par exemple, on compte 49 000 décès par an suite à la consommation d’alcool et 1 décès sur 8 à cause du tabac (chiffres du Ministère de la Santé).

Mais les addictions ont également des répercussions psychiatriques et psychologiques, avec le développement de troubles anxieux, de dépressions nerveuses. À terme, ces dépendances entraînent un vrai isolement social.

Et en entreprise, quelles sont les répercussions ? Tout dépend du métier exercé, mais il est certain que l’implication, la productivité, la prise de décision, l’évaluation des risques et les liens au sein des équipes sont fortement impactés par les conduites addictives au travail. Cela pose surtout de vraies questions autour de la sécurité de vos collaborateurs (et de vos clients). 

 

Et l’addiction AU travail ?

Quand la passion du travail devient une addiction, on appelle cela le workaholism, souvent associé à d’autres dépendances. Les workaholics s’investissent de manière excessive dans leur travail, négligeant leur vie extra-professionnelle. 

Leur équilibre est rompu : ils ont du mal à établir des limites, ressentent un besoin compulsif de travail quand bien même cette activité ne leur apportent plus vraiment de plaisir. Le burn-out n’est souvent pas très loin. Vous pensez être concernés ? L’INRS propose un livret avec des ressources et des auto-tests à effectuer pour pouvoir vous situer par rapport au workaholism.

 

Pour aller plus loin : 

 

Comment prévenir les addictions au travail ?

La responsabilité sociétale des entreprises implique de prendre en compte, en autres, les enjeux sociétaux. Cela ne concerne pas uniquement vos clients ou vos partenaires, mais aussi vos propres collaborateurs. Les addictions au travail entrent dans ce champ d’action et il est important de savoir y faire face.

 

Comment évaluer les risques d’addiction ?

C’est la première étape pour commencer une démarche de prévention des conduites addictives au sein de votre entreprise : quels sont les risques et les facteurs d’addiction ?

On en distingue 3 types : 

  • Les risques individuels, liés à la vie personnelle du collaborateur.
  • Les conditions et l’organisation du travail : sur-sollicitation, poste de nuit, hautes responsabilités, management mettant beaucoup de pression, mauvaise ambiance, etc.
  • Les pratiques de l’entreprise vis-à-vis des produits et pratiques addictives : présence d’alcools lors de nombreux événements, banalisation des pauses cigarette, absence de programme de prévention… 

La qualité de vie au travail est un vrai levier pour réduire les risques présents dans votre entreprise. Mais pour cela, il faut avant tout se former à reconnaître et gérer les pratiques addictives (qu’elles soient au travail ou non). Les risques d’addictions liés au contexte professionnel sont à reporter dans le document unique d’évaluation des risques professionnels ou DUERP.

 

Formation et sensibilisation aux addictions au travail

Pour éviter de se retrouver confronté à des pratiques addictives sur le travail, il faut à la fois que les personnes en charge des collaborateurs (managers par exemple) soient formés et qu’une campagne de sensibilisation soit menée auprès de tous. Si un responsable QVT est présent dans votre structure, ces actions peuvent être entreprises par lui ou elle.

 

Des ateliers ou des journées thématiques sont à envisager dans ce cadre : sur l’alcool, sur le tabac ou sur le workaholism, etc. Faire intervenir des associations dans ce cadre permettra à tous les collaborateurs de poser leurs questions à des personnes déjà formées à ces problématiques. 

 

Rôle et devoirs de l’employeur face aux addictions au travail

L’employeur a un rôle phare à jouer pour protéger ses collaborateurs des risques psycho-sociaux. Cela implique notamment de prévenir les risques d’addictions au travail. On fait le point sur les devoirs et la place de l’entreprise dans cette problématique parfois extra-professionnelle.

 

Obligations légales et sanctions pénales vis-à-vis des pratiques addictives au travail

L’employeur a le devoir de veiller à la sécurité physique et mentale de ses collaborateurs (article L.4121-1 du Code du travail). Ce qui rend le travail de formation et de sensibilisation aux addictions nécessaires sur le long terme. Il est du rôle de l’entreprise de minimiser les risques possibles sur le terrain, mais aussi en informant convenablement les collaborateurs sur les dépendances et leurs conséquences.

Et en cas de pratiques addictives avérées ? Le Code pénal interdit la consommation de drogues illégales (cannabis, cocaïne, etc.), que ce soit sur le lieu de travail ou non. Pour l’alcool, certaines boissons sont autorisées pendant les événements professionnels, mais le responsable d’une entreprise peut aussi décider d’interdire tout débit de boissons pour préserver ses équipes. Pour cela, le règlement intérieur est le document adéquat afin de spécifier ce type de restrictions.

 

Gérer les conduites addictives au travail

Accompagner un collaborateur qui souffre d’addictions au travail est une tâche parfois compliquée. Il convient avant tout d’analyser la situation

  • Est-ce une consommation occasionnelle ?
  • Y a-t-il des répercussions négatives à titre personnel ou professionnel ?
  • Quelle est l’origine de ces pratiques addictives ?
  • Quelles sont les conséquences sur la cohésion d’équipe ?

La dialogue semble indispensable, surtout si l’origine de l’addiction vient du travail ou si ça influe sur la qualité de ce dernier. Compréhension et bienveillance sont les clés de cette communication délicate autour d’un sujet encore tabou. L’idéal est d’intervenir le plus tôt possible, dès les premiers signes. Il ne s’agit pas d’humilier le collaborateur, mais de lui proposer votre aide.

 

Les différents intervenants au sein de l’entreprise

Vous n’êtes pas seul pour gérer les pratiques addictives sur le lieu de travail. Il est important de faire appel à des référents qui ont les compétences nécessaires pour accompagner les collaborateurs souffrant de dépendances. Les représentants du personnel peuvent être un premier relais pour mener un dialogue apaisé. 

Le médecin du travail aidera pour le volet santé (psychologique ou physique). Par ailleurs, il est habilité par le Code du Travail à faire un examen pour détecter de potentielles addictions.

Avec la CARSAT, il est également possible de bénéficier d’un assistant social si le besoin s’en fait sentir. Au cours de vos actions de sensibilisation, ne manquez pas de mentionner les CSAPA (centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie). Leur service est gratuit.

 

Pour aller plus loin :

 

Les addictions au travail sont parfois ignorées, alors que la dépendance ne résulte pas forcément que de facteurs privés. Pourtant, les ressources ne manquent pas pour s’informer et mettre en place un vrai plan de prévention des conduites addictives. Pour aller plus loin sur votre compréhension du sujet, la MILDECA a réalisé un dossier très complet sur ce sujet. Un portail en ligne dédié à cette problématique est également disponible.